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Confiteor - Jaume Cabré
Ok. Avertissement. Je sens que ce billet sera tout sauf cohérent. Ça vous arrive, vous, de lire une oeuvre littéraire et de vous sentir tout petits petits? C'est ce qui m'est arrivé avec ce roman. Il suffit que j'y repense pour être complètement bouleversée, totalement dépassée par ce grand roman. Ce grand, grand roman.
Je pourrais juste dire "Il faut le lire - il faut le lire - il faut le lire" mais je ne serais alors pas considérée comme une blogueuse sérieuse et légitime n'est-ce pas? Je vais donc tenter de rassembler mes pensées et impressions et vous en parler un peu plus.
Je pitche mais je vous avertis, avec mes mots, ça n'a l'air de rien. Ce roman, c'est l'histoire d'Adria. Ou plutôt C'EST Adria. Toute son histoire, telle qu'il la raconte à la fin de sa vie, alors que son esprit s'enfuit et qu'il tente de se raccrocher à ce qui lui reste. C'est sous la forme d'une longue lettre à la femme de sa vie que prends forme cette confession, cet aveu de culpabilité, d'être qui il est, d'être né où il est né. Mais ce n'est pas que ça. C'est aussi l'art, la guerre, l'histoire du mal (qui prend ici plusieurs formes), du pardon, de la rédemption (ou pas) de toutes les manières possibles. Bref, c'est une grande histoire, qui nous balade de siècle en siècle à travers une narration virtuose et parfaitement maîtrisée.
On passe du "je" au "il" et d'une époque à l'autre dans la même phrase, les personnages se superposent, se répondent, peu importe leur siècle d'appartenance, les questionnements sont constants, soulevés de façon subtile (ce n'est pas le bon mot mais bon...) et les réponses ne nous sont pas imposées. Jamais dans ces 780 pages je n'ai eu l'impression de me faire faire la morale. Sous nos yeux défilent des drames, petits ou grands, historiques ou humains, des personnages à la psychologie étudiée, imparfaite, très humains, avec leurs réactions diverses aux événements, avec leurs failles, leurs petitesses. Et leur grandeur parfois, à leur échelle. La possible lourdeur est contrebalancée par un humour qui nous surprend au détour d'une page mais aussi pas une très émouvante histoire d'amitié qui reste malgré tous les malgré du monde. Et par l'amour, toujours l'amour. Qui prend plusieurs formes. Malgré ça, nulle facilité dans ce roman, loin de là.
Lire Confiteor (en plus de passer des heures sur internet pour tout savoir des lieux et de ce qui est évoqué), c'est accepter d'être bouleversé, ému, choqué parfois. C'est en venir à confondre une âme humaine géniale qui s'effrite avec un monastère qui s'efface. C'est de voir l'avenir de l'homme en un violon, C'est se sentir impuissant, sans voix. C'est accepter que parfois, nulle rédemption n'est possible. C'est se sentir emporté par les sentiments, par la fatalité. C'est devoir refermer le livre parce que c'est juste trop. C'est accepter de ne pas tout comprendre tout de suite, de voir la toile se tisser lentement mais sûrement sous nos yeux. C'est se dire, que finalement, l'art est peut-être la seule rédemption possible...
Un roman puissant, génial, une oeuvre d'art en soi. Sans blague. Lisez-le!
PS: Vous savez comment je râle souvent contre les traductions? Ben celle-là est géniale. En plus, je lève mon chapeau au traducteur, Edmond Raillard (que je prends la peine de nommer) parce qu'un tel texte, une telle narration, ça a dû être disons... quelque chose! Bravo!