La maison vide - Claude Gutman

"David les a vus, son père et sa mère, leur valise à la main, entre deux policiers. Il les a attendus, longtemps, longtemps. Lui, il dormait chez les voisins depuis des mois. C'est pour cela qu'il n'avait pas été emmené. 1944... David a quinze ans, il est vivant. Il est rempli de douleur et de rage, et surtout habité par toutes ces voix contradictoires: "tu es juif, tu es comme tout le monde, tu es français, ils t'ont abandonné, il faut faire confiance, il ne faut jamais faire confiance. On est seul. On n'est jamais sseul". Il écrit pour comprendre."
Commentaire
C'est Ori qui m'a offert ce livre (ainsi que sa suite) pour avoir deviné son mensonge dans un petit jeu s'étant déroulé il y a quelques mois! En effet, elle avait tenté de nous faire croire qu'elle avait vu George Clooney en personne... alors que ce n'était même pas vrai! Armée de mon don de double-vue, j'avais deviné la supercherie... et m'étais mérité un joli colis!!
Ce livre, portant aussi sur la vie d'un juif pendant la seconde guerre mondiale (mais en France, cette fois) est bien différent de "Le pianiste", dont je vous ai parlé plus tôt cette semaine. En effet, si le premier est une histoire vraie, "La maison vide" est une fiction où l'auteur se met dans la peau d'un adolescent juif qui survit. Qui survit à la rafle du Vel d'Hiv (honte à moi, je connaissais l'événement par son nom... mais je n'avais aucune idée qu'il s'agissait d'un vélodrome d'hiver... Je pensais que c'était le nom d'une vallée qui s'appellerait "Val + quelque chose"... vous pouvez rire de ce grand moment d'humilité et d'inculture!) et qui survit aussi à la rafle de la maison pour enfants où il est réfugié par la suite. David ne souhaite qu'une chose: retrouver ses parents, qui avaient pourtant tout fait selon les règles. Et il se sent coupable. Coupable d'être en vie, d'avoir survécu.
C'est une voix d'adolescent qui résonne dans ce roman. Un ado qui a mal et qui est en colère, très en colère. Il hurle cette colère au monde, en particulier à ceux qui tentent de l'aider. C'est un roman dans l'émotif. Et David perd son identité au moment même où il devrait définir qui il est. Pour survivre, il doit devenir un autre, faire semblant de renier ce qui a été sa vie. Et sa souffrance se ressent dans chacun de ses mots, ce qui contraste encore une fois avec "Le pianiste", plein de retenue et de détachement.
C'est en fait son histoire que David écrit dans ce livre. Comme son père qui a vu sa première famille massacrée dans un pogrom, il raconte pour qu'on n'oublie pas. Les mots sont simples mais l'auteur réussit à les faire sonner vrais. J'aurais seulement souhaité que le roman soit un peu plus long, rencontrer David avant, un peu moins fâché.
Dans le document qui accompagne cette édition jeunesse, l'auteur parle de son roman et mentionne à quelques reprises que les réels témoignages de cette époque sont de façon générale assez distanciés car il serait trop dur pour leur auteur de revivre ces événement de façon émotive. À ce point de vue, ce roman est différent mais tout de même émouvant. J'ai hâte de lire la suite.
Merci à Ori de me l'avoir offert!!!
8/10