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Prep (Campus) - Curtis Sittenfeld

2 Février 2012 , Rédigé par Karine :) Publié dans #Littérature américaine

Prep---Sittenfeld.jpgPrésentation de l'éditeur

"Lee Fiora, une jeune fille de 14 ans intelligente, laisse sa famille derrière elle en Indiana pour fréquenter la prestigieuse Ault School dans le Massachussets.  Pendant les quatre prochaines années, son expérience à Aults - relations complexes avec les professeurs, amitiés intenses avec d'autres filles, une obsession constante par rapport à un camarade de classe qui est moins qu'un petit ami mais plus qu'un simple crush - révèle un portrait singulier des hauts et des bas universels de l'adolescence."

 

Commentaire

J'avais lu toutes sortes de commentaires au sujet de ce roman.  Des gens qui avaient adoré, d'autres qui ont vraiment mais alors là vraiment détesté.  Et parmi ceux avec qui j'ai souvent des goûts communs, il y en avait des deux côtés.  J'ai eu - of course - envie de me faire ma propre opinion et pour finir, vu que j'ai beaucoup aimé, je crois que j'ai bien fait. 

 

Ce qu'il faut savoir, en tout premier lieu.  Il n'y a pas de "grosse" histoire dans ce roman.  Il ne faut pas s'attendre à des péripéties extraordinaires ou à une aventure qui va changer la vie de Lee.  Elle nous relate simplement, plusieurs années après les faits, ses années dans une "boarding school" (comment vous diriez, en français... pour ma part, je dirais "au pensionnat" mais ça a quand même pour moi une drôle de connotation...) remplie de jeunes provenant de milieux aisés.   Le rythme est lent, on a droit à des scènes quotidiennes qui rendent très bien l'atmosphère un peu étouffante de cette école, où tout le monde se connaît, où tout le monde vit les uns sur les autres. 

 

Deuxièmement, Lee, l'héroïne, n'est pas nécessairement attachante.  Elle représente une minorité d'adolescents qui vivent une angoisse - très - profonde à ce moment de leur vie et, sans doute pour se protéger dans ce monde qui lui est inconnu, elle devient pratiquement transparente, se laisse marcher sur les pieds et traiter n'importe comment.  Pas que les gens soient particulièrement méchants avec elle, mais elle ne leur permet pas de s'approcher, joue l'indifférente.  De plus, si elle évolue un peu au cours du roman, disons que ça ne se fait pas nécessairement rapidement et qu'elle n'apprend pas nécessairement de ses erreurs.  Ce n'est qu'à la toute fin que j'ai pu un peu m'y attacher, sans toutefois m'y identifier. 

 

Vous lisez ça et vous vous demandez pourquoi j'ai aimé, j'imagine.  D'abord, malgré tout ça, je ne me suis pas ennuyée une seule minute, ce qui est déjà bon signe, dans un roman où il n'y a pas de péripétie abracadabrante.  Ensuite, j'ai beaucoup aimé l'écriture.  L'auteure a réussi à créer une atmosphère de vase clos qui n'est pas réellement étouffante car on réalise que prise autrement, elle aurait pu être agréable.   J'ai aimé comment les actions du quotidien, les petits drames, les tergiversations, les préoccupations pour des futilités  soient au centre du roman parce que bon, quand on est ado (et même adultes hein), on est horriblement égocentré et on s'imagine toujours que tous les yeux sont braqués sur nous.  Ou pas.  J'ai eu l'impression d'y aller, à cette école.  À la fin du roman, on a presque l'impression de connaître un peu tout le monde tant ils font partie du paysage.  Mais tous ces gens font surtout partie du tout qu'est "Ault", qui est à lui seul un personnage important du roman.

 

Tout au long de ma lecture, j'ai eu envie de secouer Lee, qui est, en fait, l'architecte de tous ses problèmes.  Elle n'a aucune confiance en elle et demande carrément aux gens de lui marcher dessus.  On a le goût de hurler quand on la voit se torturer pour un garçon qui semble complètement vide et vain.  Et encore davantage quand elle dicte elle-même les conditions qui la feront tant souffrir par la suite.  Pour se protéger, of couse.  Pour lui donner la permission de la traiter comme rien du tout.  On a également envie de lui crier de ne pas uniquement se fier aux apparences, de laisser une chance aux gens, de s'impliquer, que diable.  Car si elle reste extérieure, elle l'a quand même un peu cherché.   Alors bon, je ne m'y suis pas attachée, mais elle est venue me chercher, la demoiselle.  La relation avec les parents est intéressante également  et certaines scènes m'ont donné le goût de hurler... et m'ont rappelé ma propre adolescence.  Autant j'étais une bonne fille un peu partout, avec mes parents, j'étais une peste.  Et si j'avais eu un père comme celui de Lee, qui veut bien faire mais qui se laisse envahir par ses propres sentiments, tout en se fichant un peu de ce que les autres pensent, j'aurais fait un drame.  Pourtant, il n'est pas méchant hein.  Mais je pense que plus que tous les filles/fils à papa parfois désagréables, c'est ce personnage qui m'a le plus interpellée. Viscéralement.  Pour des pécadilles.

 

La vision de l'élitisme, du racisme et même du sexisme qui est véhiculée dans le roman n'est pas nécessairement claire.  On sent qu'il y a une critique de société là-dessous mais étant donné le point de vue qui est celui d'une adolescence, elle ne réalise pas à quel point ces choses sont présentes, et de quelles façons insidieuses.  Du coup, on ne nous assome pas à coups de sermons à ce sujet.  Les indices sont là, bien sûr.  Très là, même.  Souvent répétés. Il suffit au lecteur de les attraper.  Et ça, ça me plaît quand on ne pense pas qu'il faille tout m'expliquer au fur et à mesure. 

 

Bien entendu, au début du roman, je me suis questionnée.  Ce roman est raconté plusieurs années après et au départ, je sentais très peu le regard critique de la Lee adulte sur ses comportement adolescents. Il n'apparaît que plus tard dans le roman et même si Lee revient sur ces années, sur ce qu'elle était, sur ce qu'elle a fait de ses années de boarding school, même si après une telle intensité sa vie lui semble parfois un peu fade, il n'y a pas d'idéalisation et de nostalgie dans le roman.   Lee était malheureuse, étrangère.  Et on le ressent. Elle est fidèle à elle-même et le portrait est quand même crédible. 

 

Bref, une lecture qui m'a beaucoup plu, mais que je ne conseillerais pas à tout le monde.  Je ne crois pas non plus que ce soit pour les très jeunes ados, qui risquent de trouver ça un peu long.  Le prince charmant n'est en effet ici pas si charmant - quoi que finalement, elle ne lui a pas non plus laissé sa chance hein... il m'a un peu surpise à la fin - et les scènes de sexe ne sont pas nécessairement très valorisantes pour Lee.  Mais en tant que lectrice adulte, j'ai aimé.  Et j'ai su faire la part des choses!

 

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