Green Dolphin Country (Le pays du dauphin vert) - Elizabeth Goudge
Présentation de l'éditeur (En partie)
"Publié en 1944, Green Dolphin Country est une histoire épique d'amour, de courage et de dévotion située dans les îles anglo-normandes et en Nouvelle Zélande au 19e siècle, écrite avec le talent inimitable d'Elizabeth Goudge pour nous faire ressentir les émotions humaines."
Commentaire
Aaaah mais quel roman, quel roman! Ce fut le pavé qui a occupé presque tout mon samedi du Read-A-Thon d'automne. Une chance que c'était passionnant. C'est un roman dense, foisonnant, dépaysant que j'ai eu l'occasion de découvrir. Nous suivrons pendant 40 ans et trois générations une famille établie dans les îles anglo-normandes mais surtout Marianne et Marguerite, deux soeurs bien différente mais au prénoms bien semblables. Marguerite est blonde, jolie et aime sincèrement la vie pour ce qu'elle est. Et la vie et les gens le lui rendent bien. Marianne, l'aînée est brune, petite, accomplie, vive et intelligente. Parfois un peu trop et son statut de femme à l'époque victorienne lui pèse terriblement.
Quand l'histoire commence, elles ont respectivement 11 et 16 ans. Et le Docteur Ozanne, l'amour d'adolescence de leur mère, revient sur l'île avec son fils William, 13 ans. Tout de suite, Marianne décide qu'elle est amoureuse et dans sa tête de jeune fille, si elle est amoureuse, il ne peut en être autrement pour William. William qui n'a d'yeux que pour Marguerite.
Ce roman, c'est la recherche du bonheur, celui qui nous échappe toujours un peu, celui que l'on ne peut définir. C'est la recherche de l'amour, le grand, celui pour lequel on est prêt à tous les sacrifices. Mais c'est aussi de grandes aventures. On voudrait secouer William quand il fait gaffe sur gaffe (c'est qu'il est loin d'être parfait, ce William. Souvent faible, écervelé mais aussi fort à l'occasion), on craint pour eux quand ils voyagent sur des mers folles dans de grands et magnifiques voiliers et que la tempête fait rage, on débarque avec eux en Nouvelle-Zélande, territoire sauvage habité des Maoris qui n'en demandaient pas tant et où la vie est une lutte quotidienne. J'ai souffert autant pour Marguerite que pour Marianne et elles m'ont beaucoup, beaucoup émue toutes les deux, de façons différentes.
Ce qui m'a surtout plu, en plus du souffle épique, ce sont les personnages, hauts en couleurs, tous fort imparfaits mais très humains. Marianne est un personnage fouillé qui m'a rappelé Scarlett O'Hara à plusieurs reprises. Énervante, jamais satisfaite, jalouse mais aussi profondément consciente de ce qu'elle est et de ce que les gens perçoivent d'elle. Elle fera tout ce qu'elle croit être le mieux pour être aimée de son mari, qui souvent lui échappe. Tai Haruru, personnage sexy (et tatoué), aspirant à une liberté complète, est aussi un personnage fort et charismatique. Ses questionnements, ses déceptions, ses incertitudes m'ont beaucoup touchée. Et que dire du capitaine O'Hara, marin presque légendaire, seul maître à bord du Green Dolphin! Et de Nat. Et du pasteur Samuel et de son épouse. Et de la mère supérieure.
Les relations sont troubles, en dents de scie, jamais parfaites, parfois illusoires. Rien n'est comme on aurait pu le penser, rien n'est tout noir ou tout blanc, certains malentendus vont influencer de nombreuses vies (mais rassurez-vous, ce n'est pas frustrant pour autant) et nous amener à nous questionner sur le passé, le présent, l'avenir ainsi que sur les fondations de nos exitences.
La plume est magnifique. Les descriptions sont poignantes, magiques (surtout celles de l'île battue par les mers et celles des bateaux) et j'ai adoré la façon qu'a l'auteur de mélanger les légendes à l'histoire. Ici, les petites filles côtoient les fées sans pour autant tomber dans le fantastique. Ce livre m'a donné une envie folle de visiter ces îles, de voir ces rochers qui sont le lieu de tant de mythes. Bref, une envie de voyage.
Le seul point qui me retient de donner une note parfaite est la morale un peu judéo-chrétienne (le sacrifice pour les autres, la culpabilité, Dieu est la solution, l'orgueil, c'est le mal, etc.) qui se dégage parfois du roman. Si c'est ancré dans l'époque et fort compréhensible, j'ai parfois été agacée par cet aspect, surtout pour certains personnages (je ne dirai pas lesquels). Car oui, la religion est très présente (ce n'est pas ça mon reproche, hein... c'est normal que ce le soit, vu l'époque) et elle imprègne une bonne partie du roman. Mais c'est très, très personnel comme reproche, j'en suis consciente. Et je ne voudrais surtout pas que ça vous empêche de lire ce roman parce que pour moi, ça a été une aventure de tous les instants!
Et j'ai ma foi fort envie de lire "La colline aux gentianes" du même auteur, ne serait-ce que pour retrouver cette plume.