Une éducation libertine - Jean-Baptiste Del Amo
Présentation de l'éditeur
«C'est un homme sans vertu, sans conscience. Un libertin, un impie. Il se moque de tout, n'a que faire des conventions, rit de la morale. Ses mœurs sont, dit-on, tout à fait inconvenantes, ses habitudes frivoles, ses inclinations pour les plaisirs n'ont pas de limites. Il convoite les deux sexes. On ne compte plus les mariages détruits par sa faute, pour le simple jeu de la séduction, l'excitation de la victoire. Il est impudique et grivois, vagabond et paillard. Sa réputation le précède. Les mères mettent en garde leurs filles, de peur qu'il ne les dévoie. Il est arrivé, on le soupçonne, que des dames se tuent pour lui. Après les avoir menées aux extases de l'amour, il les méprise soudain car seule la volupté l'attise. On chuchote qu'il aurait perverti des religieuses et précipité bien d'autres dames dans les ordres. Il détournerait les hommes de leurs épouses, même ceux qui jurent de n'être pas sensibles à ces plaisirs-là. Oh, je vous le dis, il faut s'en méfier comme du vice.»
Paris, 1760. Le jeune Gaspard laisse derrière lui Quimper pour la capitale. De l'agitation portuaire du fleuve aux raffinements des salons parisiens, il erre dans les bas-fonds et les bordels de Paris. Roman d'apprentissage, Une éducation libertine retrace l'ascension et la chute d'un homme asservi par la chair."
Commentaire
Je sens que je vais avoir du mal à parler de ce livre. En effet, voilà un roman qui m'a impressionnée, auquel je reconnais de nombreuses qualités, mais que je n'ai pu apprécier qu'une fois sa lecture terminée. Je sais, c'est étrange... mais c'est quand même ce qui m'est arrivé.
C'est l'histoire d'un jeune homme, Gaspard, qui fuit Quimper, sa ville natale, sa mère qui "sent la truie" ainsi que tout ce que cette vie représente et qui arrive à Paris, sans rien, pour se construire. C'est finalement à son ascension dans le monde mais aussi à sa destruction par lui-même que nous assisterons au fil des pages.
Pendant la première partie, on se plaît à espérer pour Gaspard, on est heureux qu'il réussisse à quitter la Seine pour un avenir meilleur... sauf qu'à mesure où le personnage devient ma foi de moins en moins sympathique (bon... carrément détestable, par moments), on se concentre plus sur son évolution psychologique et sur son désir de réussir pour se venger du comte Étienne de V., libertin notoire qui l'a initié à l'amour et qui est parti tout de suite après, comme ça, sans espoir de retour. Gaspard se transforme peu à peu en un être assez abject, sans morale, prêt à tout pour réussir, même à s'auto-détruire. Il se considère supérieur à tous, croit que tout lui est dû et en veut à ceux qui ont été là pour lui car ils le tirent selon lui vers le bas. Pas de sentiments et pour sentir quelque chose, Gaspard tentera tout ce qui est en son pouvoir, par tous les moyens à sa disposition... quitte à tout y laisser.
Le personnage qui m'a le plus fascinée est sans conteste le comte Étienne de V. qui fait penser un peu à Valmont par certains côtés. Emma, la prostituée généreuse qui tient sincèrement à lui m'a aussi touchée. Quant à Gaspard, il tente d'être comme son modèle sans y parvenir, sans s'élevé au-dessus de la médiocrité qu'il croit sentir pourrir en lui. La ville de Paris est également un personnage à part entière, grouillant, respirant et... exhalant. Parce que bon, si à la fin de ce roman on ne sait pas que Paris puait à l'époque, c'est qu'on a dormi tout le long de la lecture.
Cette mise en situation est, pour piquer les mots d'Isil avec qui j'en ai discuté, efficace. L'écriture est dense, surchargée d'adjectifs, tout comme la ville nous paraît étouffante. J'ai étouffé dans ce roman. Diablement efficace pour le régime aussi parce qu'après avoir lu ce livre, j'étais incapable de manger quoi que ce soit pendant au moins 2 heures. Et j'ai généralement le coeur bien accroché. Sauf que là, pour mon goût personnel de lectrice, ça a été trop. Il y a énormément de descriptions (la première partie, entre autres,où l'on nous présente Paris, en est principalement composée), toutes plus dégueulasses les unes que les autres, à croire qu'il n'y avait presque rien de beau et "pas puant" à Paris à cette époque On exploite à fond le champ sémantique du corps et de ses sécrétions variées. À répétition. Et pour moi, ça a été beaucoup trop et ça m'a donné une impression "d'artificiel", comme si on avait voulu m'en mettre plein la vue et le nez. Les mots "violer" et "puer" reviennent à je ne sais combien de reprises (j'ai renoncé à compter) et si c'est probablement voulu, ça a quand même réussi à m'énerver.
Malgré tout, je reconnais que la plume est soignée, originale et qu'elle m'aurait beaucoup plu si elle ne m'avait pas levé le coeur à toutes les 10 lignes. Un roman intéressant, dont j'ai apprécié la finale, tout particulierement, mais auquel j'ai quand même trouvé quelques longueurs. Pour les lecteurs au coeur bien accroché.
Merci à Lise et aux Éditions Folio pour cette lecture!