Le buveur de lune - Göran Tunström
Présentation de l'éditeur
"Il y a dans le monde ordinaire de Göran Tunström une naturelle disposition à l'extraordinaire, et nul ne saurait s'étonner que Pétur, narrateur de ce livre, ait été mis au monde par une "maman sismique", morte avalée par la montagne. Ou que, grandissant à l'adresse prédestinée du 12, traverse des Poètes, il ait reconnu en son père un buveur de lait de lune.
Une tendre folie parcourt ce roman méditatif, où les notes graves - la fuite du temps, la solitude, l'approche de la mort - alternent avec les éblouissements de la musique et de la poésie. Mais "Le buveur de lune" témoigne surtout du pouvoir narratif de Tunström, de son immédiate perception des scintillements magiques de l'existence, qui donnent à voir autrement la réalité et qui l'enchantent."
Commentaire
J'ai refermé ce roman il y a près d'une heure. Heure que je viens de passer à fixer droit devant avec un sourire un peu triste, à réfléchir sur ce que je viens de lire. Et bon, en fait, je ne sais trop quoi en dire; c'est souvent ce qui arrive quand une lecture me pousse dans certains retranchements. Une lecture émouvante, un peu éprouvante aussi, mais surtout très belle.
Se laisser porter par la plume de Tunström est quand même toute une expérience. J'ai mis presque 4 soirs à lire ce roman malgré à peine 300 pages. C'est que je me suis délectée des phrases, les ai lues, et puis lues encore. Il s'agit d'un roman très poétique, qui nous tranporte dans une Islande de glace et de feu, mais aussi une Islande un peu magique, irréelle. Un "tout petit pays", presque un gros village, où le gouvernement joue au Scrabble dans votre salon et où une vie entière est déterminée par le trajet d'un ballon jusque dans la cour d'un ambassadeur de France.
Pétur est le narrateur de ce roman, qui revient en Islande pour s'isoler, pour écrire. Il nous racontera d'abord son enfance, puis sa sa vie, à travers des flashbacks, des lettres, des souvenirs saupoudrés ici et là, vus à travers la lunette de l'enfant, puis de l'adolescent qu'il était. Souvenirs de sa vie, du chemin parcouru vers lui-même mais surtout souvenirs de son père, être fantasque et un peu fantastique, qui a modelé une grande partie de sa vie.
Ce roman m'a énormément touchée, par ses mots et aussi ses thèmes. On nous parle du temps qui passe, qui coule, qui disparaît pour nous laisser un peu au bord de la route. On nous parle de découverte de soi mais aussi d'attente de la mort et de regard sur le passé. La relation père-fils est touchante, mouvante et on ne peut qu'être ému par les sentiments des deux hommes et par leurs rôles qui évoluent. Tunström réussit à nous faire ressentif l'inéluctable toute cette route vers la fin de façon réaliste mais également lumineuse. Le tout sans oublier une touche d'humour, des scènes improbables mais belles et des images qui m'ont transportée.
Un peu triste, oui, mais surtout très beau et très émouvant. Ce n'est pas un roman sur le deuil ou sur la vieillesse. Ils sont là mais n'occupent pas tout le roman. C'est aussi un cheminement, une vie et beaucoup de "magie ordinaire".
À tenter si vous n'avez pas peur d'être un peu perdus au départ, et si vous accepter de vous laisser porter pendant un moment.
Une très belle lecture.